Un mois déjà, et quelques jours, que nous sommes arrivés sur le sol français. Son printemps tardif avec son lot de pluie et de vent froid nous aura mis à mal. Nous voici coincés (!) à Mulhouse, dernière étape française de notre périple, tentant tant bien que mal (ou l’inverse?!) de nous extirper de cette gangue fiévreuse qui nous emprisonne dans ses tenailles depuis plus d’une semaine. Nous sommes aux prises avec une bonne grippe d’homme !
Un mois déjà que nos journées filent au ras de l’eau des fleuves, des canaux et de leurs dizaines d’écluses. Que la campagne française déroule sous nos yeux ce pays si cher aux Français, bien tangible. Toutes ces maisons avec un jardin à l’arrière et des poules, des chèvres, des canards. Même celle de l’éclusier. Des potagers et des arbres fruitiers en fleurs. De quoi bien se nourrir. Importance capitale. Et dans les pâturages, combien de vaches, de chevaux et d’ânes ? Et tous ces hérons s’envolant à notre approche et tous ces cygnes glissant majestueusement sur l’eau et qui ponctuent notre quotidien. Nous prenons très peu de photos mais nous en prenons plein les mirettes !
Un mois déjà que nous vivons, en synchronicité, coup de pédale après coup de pédale, deux corps en mouvement dans le paysage. Que nos muscles se tendent et se relâchent. Que l’effort se partage. Que nos souffles s’harmonisent. Que nous nous encourageons et nous félicitons mutuellement. Que nos paroles se mêlent et que le récit qui en découle accompagne nos déplacements. Que nous nous sentons, ensemble, pleinement vivants !
Un mois déjà que nos soirées s’enrichissent des discussions que nous avons immanquablement avec nos hôtes et dont les sujets sont fort variés. Que nous prenons le pouls de cette culture, si différente de la nôtre. Que nous écoutons, tentant de retracer les fils des valeurs et des croyances qui sous-tendent les discours et structurent la société. Que nous nous essayons à comprendre, malgré le manque de références et une surabondance d’acronymes, une minuscule parcelle des idéaux français. Que nous vibrons, avec eux, dans cet attachement à la terre, à la paysannerie. Que nous leur envions la richesse et la diversité des activités culturelles qui essaiment dans chaque petite ville.
Un mois déjà que nous vivons au diapason de nos hôtes français, que nous nous ajustons aux petites différences culturelles dans tous ces gestes qui rythment le quotidien. Le soir, on ferme les volets. Au Québec, il n’y en a pas. Ah! Non ? Air ahuri des Français. Le matin, on mange les tartines à même la nappe, sans assiette. Air ahuri d’Étienne. Le pain, c’est le 4e ustensile, celui qui permet de nettoyer bols et assiettes. Les toilettes sont dans une pièce; la baignoire et le lavabo dans une autre. Et ainsi de dizaines de petits détails.
Un mois déjà que la parole tisse des liens entre nous, voyageurs de passage, et tous ces gens qui nous ont si bien accueillis. Que les propos, de part et d’autre, ont percé de nouvelles ouvertures, ont agrandi ou changé la perspective. Que les mots ont pu se déployer sur les plans intellectuel et sensible, réel et onirique. Que les contes partagés nous ont rassemblés et nous ont, chacun à notre façon, montré des pistes insoupçonnées.
Un mois déjà et il faudra très bientôt se dire au revoir. Peut-être que c’est ça, le noeud dans ma gorge.

Rue des boulangers à Mulhouse : là où un petit nid nous permet de nous remplumer

Citadelle de Besançon

Dans la vieille ville de Besançon

Dole sous la pluie

La cour intérieure de la mediathèque de Dole
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